Dr Boukary Sawadogo est professeur d’études cinématographiques, à City University of New-York. Il est aussi promoteur de « Harlem African Animation Festival », un festival de cinéma à New-York. Présent au Burkina Faso, dans le cadre du FESPACO comme chaque année, Dr Boukary Sawadogo a accordé une interview à l’Observateur Paalga dans laquelle, il est revenu sur le cinéma Burkinabè et Africain ainsi que le FESPACO. Pour lui, il est nécessaire de réformer le FESPACO et l’adapter au contexte actuel.
Avant d’aborder la question du FESPACO, Dr Boukary Sawadogo s’est penché sur la question du cinéma Burkinabè et Africain. Dr Boukary Sawadogo a apprécié la trajectoire actuelle du cinéma. Il a estimé qu’avec des réalisateurs comme Apolline Traoré, Alain Gomis du Sénégal, Alex Ogou de la Côte d’Ivoire, nous avons droit à de bons films. Tous ces réalisateurs, dit-il; bénéficient de l’apport des acteurs de talents tels que Issaka Sawadogo, Mahoula Kané et bien d’autres.
Toutefois, dans le cas Burkinabé, il y a quelques manques à gagner affirme-t-il. Selon lui, il n’y a pas assez de grosses productions au pays des Hommes intègres pour espérer gagner l’Étalon d’Or. A l’entendre, il est vrai que Sira est passé tout près de l’avoir mais à y voir de près le fossé est encore grand. « il y a des pays qui produisent 4 à 5 longs métrages par an, avec l’appui des chaines cinématographiques qui marchent bien. Au Burkina Faso, il y a de bons producteurs mais on a besoin de beaucoup plus. On a aussi besoin de scénaristes. Pour faire un bon film, il faut une bonne écriture. A ce niveau, ça pêche beaucoup(…) Il existe un grand fossé entre les pays maghrébins et ceux subsahariens » s’exclame-t-il.
Il poursuit en disant que pour rattraper le retard, il faut une montée en puissance du cinéma Burkinabè et Africain. Il faudra à l’écouter développer les différents métier du cinéma chez nous. Il va falloir positionner les thématiques abordées dans les films par rapport à notre culture. Si, explique-t-il, les films américains marchent, c’est parce qu’ils ont réussi à faire un lien avec l’histoire américaine, la culture américaine. En Afrique en général et au Burkina Faso en particulier, pour développer le cinéma, il faut ce genre de production. Il faut des productions sur l’histoire de Samory Touré par exemple.
Avant les gens venaient voir quelles étaient les tendances et les nouveaux talents sur le continent. Ouagadougou était un passage obligé avant d’aller aux festivals en occident. Maintenant, les gens ne passent plus forcément par le FESPACO
Quant au FESPACO, Dr Boukary Sawadogo a dans son intervention déclaré que le concept actuel du FESPACO tient des années 1960. Le FESPACO au départ, dit-il, « n’a pas été conçu pour faire de l’argent « . Pour lui 54 ans après, il faut le moderniser. Il est indispensable de le réformer, définir un modèle économique pour le FESPACO, développer des mécanismes de financements au-delà de la contribution de l’état. «Il faut s’asseoir, réfléchir sur la manifestation et se projeter dans l’avenir afin de décider de quel FESPACO, on veut en 2030 ou en 2050». La raison qui explique la nécessité de cette démarche, c’est que selon lui, «le monde festivalier a changé ». Bien que le FESPACO soit un instrument politique et diplomatique du Burkina Faso, Dr Boukary Sawadogo estime qu’il faut cependant mesurer « quel est le rôle de l’état et quel est celui du professionnel. Quel sera le rôle des diasporas et quelle identité donnée au FESPACO».
Dr Boukary Sawadogo avec son trophée de meilleur enseignant 2022 Black Studies Program
Tout comme le FESPACO, le cinéma Burkinabè a besoin d’une identité. L’identité à l’écouter permet de faire en sorte que même si, on est dans l’océan Indien, qu’on puisse savoir ce qu’est le FESPACO, ce qu’est le cinéma Burkinabè. Ainsi, affirme-t-il, on pourra vendre, drainer du monde et devenir un carrefour du cinéma africain et mondial.Pour parvenir à cette dynamique, Dr Boukary Sawadogo demande à ce que des assises nationales sur le cinéma soient organisées. Ces assises permettront d’après Dr Boukary Sawadogo que les problèmes du cinéma soient évoqués. Mais avant d’arriver aux assises, Dr Boukary Sawadogo a suggéré que FESPACO tisse des liens avec Hollywood, en commençant par inviter les grands réalisateurs noirs africains, les grandes boîtes de production ainsi que les réalisateurs noirs africains de la diasporas.
Saydou GANAME