Déjà sept jours d’exposition. Qu’il semble proche et loin à la fois, le jour où le Président de la Transition, le Capitaine Ibrahim Traoré a donné le coup d’envoi officiel de la 16ème édition du SIAO. Depuis une semaine, les artisans de 21 pays sont à pied d’œuvre pour écouler leurs produits. Entre communication, merchandising et même interpellation, tous les moyens sont bons pour vendre. Seulement, la clientèle n’est pas au rendez-vous et les produits s’écoulent difficilement.
Il est 10h30 en ce 1er février 2022 à notre montre quand nous avons mis pied au SIAO. Avant d’avoir accès au site, nous avons pris le soin de mettre notre engin dans un parking érigé pour la circonstance car comme le dirait l’autre : «chacun n’a qu’à protéger son nez » par conséquent, nous protégeons notre engin.
Après coup, nous avons pris la direction des salons d’exposition. Mais avant d’y avoir accès, il fallait satisfaire aux exigences de la sécurité. Une fouille complète est nécessaire. Le corps, les poches, le sac tout est passé au peigne fin par les forces de l’ordre.
Matériels de reportage en main et badge accroché au cou, nous avons enfin accès au SIAO, direction le pavillon arc-ciel. Là-bas, nous avons rencontré Miss Bilé. Elle est créatrice de mode, originaire de la Côte d’Ivoire. Elle expose des articles de femmes, des robes, des chemises pour hommes, et des vêtements pour enfants. N’étant pas encline à nous parler, nous avons dû insister pour la convaincre. Elle accepte finalement de nous parler.
Il faut noter que Miss Bilé, la cinquantaine, teint clair, chapeau couleur marron sur la tête, robe en soie, n’est pas à son premier SIAO. Elle y expose depuis 2008. Les éditions précédentes, elle avait l’habitude de voir du monde, par contre cette année, Miss Bilé dresse un bilan pour le moins négatif concernant le taux d’affluence. Après, une semaine d’exposition, Miss Bilé fait savoir: « il faut dire que c’est un peu lent. On espère d’ici, la fin que les gens viendront nombreux donc on espère toujours mais sinon jusque-là ; l’affluence n’est pas grande. Dans les soirées, on a un peu plus de monde mais dans les journées, ce n’est pas le cas. On espère avoir un peu plus. Au SIAO de l’année surpassé, nous avons eu droit à plus de monde. Que ce soit en journée ou en soirée. ».
Miss Bilé n’est pas la seule à crier au manque d’affluence, du côté de Vanessa Nikiema/Sawadogo, une exposante Burkinabè, c’est le même son de cloche. Elle explique : « Walaye que SIAO de cette année-là, c’est chaud. Les gens ne viennent pas. S’ils viennent, ils n’achètent pas beaucoup. C’est un peu seulement donc les produits sortent difficilement. D’habitude les grossistes viennent chercher les produits pour les revendre, cette année, ce n’est pas le cas. On espère des jours meilleurs. Il reste 04 jours donc on y croit et on espère avoir tout écoulé d’ici là. »
« On n’a jamais fait le SIAO après les fêtes » Miss Bilé
Nous avons trainé notre bâton de pèlerin et nous nous sommes retrouvés devant un stand Malgache. Exposant au SIAO depuis 2002, Bakoly Ramanitara avec son équipe composée de 3 personnes vend des produits artisanaux de Madagascar comme des paniers, des sacs, des chapeaux, des décorations d’intérieurs comme des coussins, des rideaux faites à base de fibres naturels de Madagascar tels que le raphia et la cisaille. Aussi, Bakoly Ramanitara expose des produits fabriqués à partir de la corne de zébu.
Pour, elle, c’est toujours un plaisir d’exposer au SIAO même si, cette année, les clients rechignent à se présenter et acheter les produits. A la question de savoir, pourquoi, l’affluence est moins bonne que les éditions précédentes, Bakoly Ramanitara pointe du doigt la date du salon. A l’écouter : « c’est la première fois que le SIAO se tient à une telle date. C’est-à-dire en janvier. Janvier correspond à l’après fête et c’est la période où les gens ont le moins d’argent. D’habitude, le SIAO, c’est en novembre. Les gens y font leur marché pour les fêtes et les commerçants viennent acheter en gros. On a des particuliers qui viennent mais les grossistes ne viennent pas. C’est sûrement dû à la période »
La même raison est évoquée par Miss Bilé, « on n’a jamais fait le SIAO après les fêtes. Après les fêtes, c’est la défaite. Après les fêtes, les gens n’ont plus d’argent. C’est un peu difficile. Les gens font l’effort pour venir mais la période n’est pas propice aux achats. C’est la janviose comme on dit. Pour cette raison, on a essayé de faire des réduction pour permettre à tout le monde de se faire plaisir mais bon, ce n’est pas simple. C’est le mois de janvier. C’est un mois en général, très très difficile. ».
Quant à Carole Sandwidi, exposante Burkinabè, elle met cette absence d’engouement sur le coup de la situation sécuritaire qui se veut précaire. Selon elle, la situation du pays explique pourquoi, les populations sont réticentes à venir. Il est vrai toujours selon elle que les forces de sécurité ont érigé un périmètre de sécurité et multiplient les fouilles et les patrouilles mais la psychose fait que le SIAO ne suscite pas trop d’engouement cette année. « Il y a eu les reports, il y a la situation sécuritaire, ça fait que nous ne pouvons pas avoir beaucoup de clients. Mais ce qui est intéressant, c’est le SIAO, ce n’est pas qu’une question de vente. C’est aussi un moyen de se faire connaître et de nouer des relations. Le SIAO, c’est maintenant mais on pense à l’après SIAO. On peut se faire des partenaires et vendre nos produits hors du Burkina Faso. »
« Nous connaissons la situation du pays mais
L’édition se tient pour le grand bonheur des artisans. Cette édition est celle de la résilience »
Il est vrai que la présente édition du Salon International de l’Artisanat de Ouagadougou se tient avec un faible engouement par contre tous les exposants sont unanimes pour dire que cette édition du SIAO est l’édition de la résilience. Malgré, les difficultés ayant contraint aux reports, la 16ème édition s’est tenue. C’est pourquoi, Miss Bilé salue le gouvernement Burkinabè. « D’ici, la fin, nous espérons faire de bonnes ventes et nous créer des partenaires d’affaires (…) Si, cela est possible, c’est grâce au gouvernement du Burkina Faso qui a tenu malgré tout à organiser le SIAO. Nous connaissons la situation du pays mais l’édition se tient pour le grand bonheur des artisans. Cette édition est celle de la résilience »
Miss Bilé n’est pas la seule à avoir cette opinion du SIAO 2022 qui se tient en 2023. Tous les exposants rencontrés, le font savoir, le SIAO n’est pas qu’une question de vente, c’est du réseautage mais également, c’est un symbole, montrant que peu importe les difficultés, les artisans doivent vivre de leur art et la vie doit continuer.
Ismaël Garané
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